La semaine dernière le journaliste Luc Larochelle s'est penché sur la situation de l'immobilier en Estrie, en analysant non seulement les chiffres i.e. une augmentation significative de 19 pour cent des transactions récemment, mais surtout du fait que les baby-boomers se tournent vers le condo afin de se libérer de l'entretien. Mais qu'en est-il de cette croissance des propriétés à vendre et de la nouvelle règlementation entrant en vigueur ce matin selon laquelle les nouveaux acheteurs, pour se qualifier, devront allonger beaucoup plus de dollars mensuellement? Qui donc achèteront les propriétés des baby-boomers? Beaucoup de questions et le journaliste se penche sur la questions. Voici son texte publié dans la Tribune
Le marché immobilier sherbrookois ressemble à un lac les jours où le vent prend congé. Cette image statique d'un miroir ne signifie toutefois pas qu'il est sans vie.
Au contraire, la hausse de 19 pour cent du nombre de transactions conclues au cours du dernier trimestre dans la Région métropolitaine de Sherbrooke (RMR) est la plus significative depuis 2009. À 28 pour cent, le bond est encore plus appréciable sur le territoire de la ville.
Les comparables sur un an sont un peu moins spectaculaires. De 2015 à 2016, les ventes ont progressé de 7 pour cent dans la RMR (Sherbrooke, Magog-Orford, le secteur de North Hatley ainsi que la couronne sud du Val-Saint-François) et de 5 pour cent dans la ville-centre.
Idem pour les valeurs. Le prix moyen des propriétés unifamiliales vendues depuis douze mois a été de 248 261 $ dans la RMR de Sherbrooke et de 218 304 $ sur le territoire de la ville unifiée, valeurs représentant des majorations de 4 et de 2 pour cent.
« Globalement, ce sont des données positives. Reste à voir ce qui se passera avec le nouveau mode de calcul de la capacité d'emprunt », commente le président de la Chambre immobilière de l'Estrie, David Bourgon.
Le resserrement du crédit imposé par Ottawa touchera les acheteurs ne disposant pas d'une mise de fonds minimale de 20 pour cent pour acquérir la propriété qu'ils voudraient s'offrir. Leur potentiel de financement ne sera plus calculé à partir des taux effectifs, mais en tenant compte de leur capacité à faire face à des taux un peu plus élevés.
Sans entrer dans la mécanique, si un ménage disposait cette semaine de revenus suffisants pour acquitter des paiements hypothécaires de 800 $ par mois sur une maison, il devra dorénavant avoir une marge de manoeuvre allant jusqu'à 1000 $ pour s'acheter la même propriété.
Le lac de l'immobilier à Sherbrooke est plutôt stable, sans nécessairement être stagnant. Parmi les remous peu visibles en surface mais dont les effets sont plus en plus perceptibles en profondeur, il y a le courant des boomers qui vendent leur maison en faisant le choix de devenir locataires.
« La courbe démographique nous l'annonce depuis longtemps et on sent le mouvement prendre de l'ampleur. La nouvelle donne, c'est que le nombre de personnes refoulées aux portes augmentera en même temps que ceux qui prennent la porte et qui sortent définitivement du marché des acheteurs. C'est cet effet combiné qu'il faudra surveiller au cours des prochains trimestres », estime le courtier Jean-François Bérubé.
Bien qu'il trouve actuellement preneurs pour ses unités haut de gamme vendues plutôt qu'offertes en location, l'un des promoteurs du complexe Urbano, Matthieu Cardinal, acquiesce.
« C'est une tendance lourde, bien documentée, qui se déclenche au tournant de la soixantaine. Le défi sera de bien lire et comprendre le marché pour être en mesure d'y répondre », juge M. Cardinal.
Retour à la pyramide des âges, pour se rappeler que 1959 a été l'année la plus fertile en naissances au Québec. Cette masse franchira le cap des 60 ans dans trois ans. C'est presque demain.
Ça ne se produira pas du jour au lendemain, mais imaginez les effets de bascule d'une partie de cette masse chez les locataires. Sans oublier les malheureux de ne pouvoir en sortir.
Pas besoin d'être devin pour comprendre que ça risque à un moment donné de créer, momentanément du moins, une pénurie d'acheteurs et une éventuelle baisse de prix.
Quand même ceux qui hésitent à vendre commenceront à craindre de vendre trop tard au risque de perdre une partie du capital pour leurs vieux jours, ça pourrait précipiter les choses.
Lorsque les boomers planifiant de passer du bungalow au condo sans entretien percevront des signes d'instabilité du marché, ils seront peut-être portés à changer d'idée. À plutôt devenir locataires.
Gardez un oeil sur le lac. Servez-vous du miroir qu'il est pour regarder derrière, pour vous rappeler la brutalité du point de rupture que le baby-boom a provoqué sur le marché du travail, que ce soit pour la permanence des emplois ou encore la viabilité de caisses de retraite.
Le soleil brille encore, mais gardez aussi à l'esprit que nous sommes à l'aube d'une mutation susceptible de créer des vagues de la même amplitude.
Et vous? baby-boomer? Êtes-vous sur le point de vendre votre maison? Pour une plus petite ou vers un condo? Donnez-nous votre opinion et nous vous conseillerons avec joie et professionnalisme!
Lise Desmarais et Fabrice Barré au nom de toute l'équipe